J’ai posté, en début de semaine, un témoignage accablant d’une consœur sur sa première expérience éditoriale.
Pour compenser un peu, aujourd’hui j’ai décidé de te raconter, ami lecteur, un truc positif lié au métier d’auteur. Mais pour trouver une anecdote heureuse, j’ai dû chercher longtemps, très longtemps, très très longtemps… non je déconne.
L’autre jour je me baladais tranquille dans la rue. Et pis, y’a un couple qui m’interpelle sous mon nom d’auteur. Et c’est marrant car je réagis normal, style genre c’est mon vrai blaze, et je regarde ce couple sans les remettre tout de suite. Puis je me répète le nom avec lequel ils m’ont appelé et je me dis : ok, c’est des lecteurs. Là, je me souviens très bien d’eux. Ils étaient venus me rencontrer lors d'un salon du livre.
Ils sont tous contents de tomber sur moi par hasard, ils viennent de lire mon dernier bouquin. Ils ont adoré, ils n’ont pas lâché le livre avant la fin, le truc de malade, quoi. Je souris bêtement en disant « ah, tant mieux, je suis content que ça vous ait intéressé, merci ». Dans ces moments-là, je ne sais jamais trop quoi dire. C’est con mais je me sens tout pataud et tout bizarre quand des lecteurs viennent me dire qu’ils ont surkiffé mes romans. De toute façon, qu’y a-t-il à répondre ? Rien. Tu les laisses parler, voilà tout.
Ce couple, c’est des gens bien. Je sais pas, des fois, y’a des gens qui vous tapent dans l’œil plus que d’autres. Eux, c’est leur cas. Des gens simples, polis – je crains assez les lecteurs qui te tutoient et te racontent leur dernier plan cul alors que, pour toi, au cas où ils auraient oublié et objectivement ils ont oublié, ce sont juste de parfaits inconnus – charmants, pas des bourges, juste des gens normaux, je sais pas trop comment les qualifier, des gens qui pourraient être mes voisins. Je suis heureux que mes romans séduisent ce genre de personnes. Ils ont l’enthousiasme un peu naïf des lecteurs qui ne savent rien du monde de l’édition, et je les envie. Ils me demandent pourquoi, depuis un certain temps, je ne fais plus de salon ni de signature. Je réponds que je travaille beaucoup sur un projet, je ne glisse pas la moindre allusion à la répulsion que m’inspire le milieu littéraire – quelle putain de victoire sur moi-même. Rester positif, ne pas déballer des trucs négatifs à des gens qui n’ont pas demandé à connaître l’envers du décor.
Ils me posent des tas de questions à propos du projet sur lequel je travaille, je réponds un peu, pas trop, je n’aime pas parler d’un texte dont je ne suis même pas certain qu’il sera un jour édité.
La femme me raconte alors :
- La semaine dernière j’étais dans le métro et je terminais votre roman. La personne à côté de moi lisait à la dérobée et se trémoussait sur son siège… Je voyais que le livre l’interpellait et je lui ai montré la couverture en disant : c’est un jeune auteur fantastique, vous devriez absolument le lire. Et mon voisin de siège a répondu qu’il vous connaissait très bien, car il était bibliothécaire, et qu’il trouvait vos livres abominables… Si vous saviez comme j’ai pris votre défense ! Jusqu’au terme du trajet, je me suis fait un malin plaisir à chanter vos louanges rien que pour l’ennuyer. Celui-là, il saura que vous avez un lectorat derrière vous, à l'avenir !
Voilà, maintenant je sais qu’il y a des gens, quelque part en France, qui vont argumenter des heures sur mes qualités d’écrivain, juste histoire de faire bien chier mes détracteurs.
Ben moi, ça m’a fait plaisir.
Des questions ? Ou un simple besoin d'affection ?