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7 août 2012 2 07 /08 /août /2012 13:42

 





 



Aujourd'hui nous allons découvrir bien plus que des notions : un véritable manuel de survie dans notre société française du début du 21ème siècle.

Soit, le capital objectif et le capital intersubjectif. Mais qu'est-ce que c'est que ces grossièretés, nom d'un topinambour, trépignes-tu, ami lecteur ?



Tu vas voir, c'est extra simple.

 

 

 

 

Le capital objectif.



Le capital objectif est un capital qui se comptabilise. Tout connement.

Exemple.

Jean-Michel Bidule vient au monde dans une famille qui possède une villa à Mougins, une résidence secondaire en Normandie, mais aussi deux appartements à Paris, et un immeuble de rapport dans la même ville entièrement destiné à la location.

Sur son compte en banque, à l'âge de deux mois, Jean-Michel possède déjà la coquette somme de 5000 €. Ben ouais. Ça se passe comme ça, chez les Bidule.

Ces villas, ces appartements, cet argent, tel est le capital objectif de Jean-Michel Bidule.



Tu seras d'accord avec moi pour dire que Jean-Michel Bidule est riche, d'un point de vue patrimonial. D'un point de vue financier, ce n'est pas encore le Pérou, mais il n'a que deux mois. Le fric viendra.



http://image.blingee.com/images18/content/output/000/000/000/720/680679907_918516.gif



Le capital intersubjectif.



Contrairement au capital objectif, le capital intersubjectif ne se comptabilise pas, ni ne se quantifie. Il est intersubjectif car il repose sur des valeurs qui n'existent que par convention sociale : inter – plusieurs – subjectif – sujets. Plusieurs sujets. Intersubjectif.

Le capital intersubjectif : voilà quelque chose que l'on évoque très rarement, lorsqu'on cause politique. Pourtant, de quelle cruelle importance est doté le capital intersubjectif ! Tu vas mieux saisir avec l'exemple, toujours, de Jean-Michel Bidule.



Notre Jean-Michel Bidule est donc né dans une famille claquée de tunes. On l'a vu plus haut. Ok.

Mais Jean-Michel Bidule est surtout né d'un père polytechnicien et d'une mère issue d'une grande famille de la bourgeoisie entrepreneuriale française. Jean-Michel Bidule est rompu, depuis sa plus tendre enfance, aux codes et aux systèmes moraux des classes supérieures. Pour Jean-Michel Bidule, terminer ses études par HEC, l'ENA, ou Polytechnique (qu'il surnomme « X »), après être passé par « H4 », c'est normal. Depuis sa naissance, il subit (ou bénéfice de, c'est selon) un dressage idéologique voué à faire de lui le digne rejeton de sa classe sociale.

Il part avec un bagage culturel, si je puis dire, mais aussi éthique, moral, névrotique, que tu n'as pas, toi qui es pauvre. Il sait faire. Il a le code. Toi, tu ne l'as pas : si tu réussis aussi bien que lui, c'est que tu as appris vite et que tu fais preuve d'une formidable capacité d'adaptation. Bravo.



Mon exemple est volontairement caricatural.

Dans un cadre de référence plus commun, le capital intersubjectif explique entre autres les écarts de réussite à l'école publique entre les enfants d'ouvriers, d'employés et de cadres.



J'ai récemment dévoilé les notions de capital objectif et de capital intersubjectif à un ami. Le pote chinois qui a présenté sa thèse de doctorat dans mon article : Définition de terrorisme intellectuel. Il a longtemps bataillé pour décrocher un poste à l'université. Autour de lui, il voyait d'autres jeunes doctorants lui passer devant les doigts dans le nez, et il ne comprenait pas.

Je suis plus compétent qu'eux, je le sais, et pourtant ils ont collectionné les meilleurs postes pendant des années, alors que je me tuais à seulement trouver une place de stagiaire. Pourquoi ?

Il me parle plus précisément de deux de ces jeunes doctorants. Il est amer. Je le comprends. Je lui demande s'il sait ce que font leurs parents, dans la vie.

Eh bien, je crois que ce sont des gens qui ont un peu d'argent. Celui-là, son père dirige une collection chez tel éditeur. L'autre, il vient d'une famille d'artistes, enfin, de gens qui sont dans le théâtre et le cinéma.

Et tu oses te mesurer à ces gonzes-là ? Voyons, vous ne partez pas à égalité.

Si, on est dans l'université publique, je ne vois pas en quoi ils seraient mieux jugés que moi. L'argent ne fait aucune différence.

Tu penses trop comme un Chinois.

Je suis un Chinois.

Mais tu es en France, pour l'instant. Tu ne réalises pas le poids du capital intersubjectif dans la société française ! Ces deux doctorants, ils maîtrisent un code que tu n'as pas appris. Toi, tu es le fils de deux ouvriers chinois, tu es venu ici pour tes études. Eux, ils détiennent un autre capital intersubjectif, et crois-moi, ils détiennent le monde. Quand vous vous présentez pour vos postes, vous passez des entretiens, et au cours de ces entretiens, les personnes qui vous évaluent distingueront clairement que toi, tu es un pauvre chinois enfanté par de bas prolétaires, et que eux, ils font partie de leur classe sociale, qu'ils ont été enfantés par des professions intellectuelles supérieures. Comment distingue-t-on ces différences ? Va savoir ! Tout le politique capitaliste est un non-dit. Quand je dis le politique, je parle des relations inter-humaines. Alors, mon pauvre vieux ! Tu pars perdant. Bien entendu, continue à tenter le coup. Ils te céderont bien quelque chose, au bout d'un moment. Mais pour toi, ce sera plus long, plus dur, et tu peineras à te faire reconnaître comme leur égal. C'est ainsi. On ne pardonne pas facilement aux pauvres leur naissance. Et encore moins leur prétention intellectuelle.

Mais c'est terrible.

Non, c'est simplement possible. Voilà tout.





 

 

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commentaires

J
<br /> Année plus que pourrie, mais je me plains pas, y a toujours pire.<br />
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S
<br /> ça fait plaiz de te revoir ici Jojo ! désolé pour ton année pourrie. moi c'était 2011 qui était à chier.<br />
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J
<br /> Ma mère a eu affaire à cette injustice qu'on m'a conté et reconté si jeune que je crois être né en le sachant.<br /> <br /> <br />  <br /> <br /> <br /> Merci pour l'article ;)<br />
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A
<br /> bien.... mis à part que les commentaires m'ont collé un bon mal de crâne (en bonne petite pintade prolétaire aspirant à la pauvreté extrème vu qu'elle a fait 5 ans d'université pour peanuts puis<br /> n'a jamais trouvé comment s'insérer dans la société, et dénuée de l'intelligence de base qui lui rendrait tout ça clair comme de l'eau de roche) en même temps bien fait pour moi, je n'avais qu'à<br /> pas les lire ^^ je n'aurai en fait qu'un truc à dire. Tu sais quoi ? Moi j'aime bien quand tu expliques. Parce que je comprends tout (je ne sais pas, mes 2 neurones s'agitent et entrent en<br /> collision ?!). D'accord ou pas avec ta vision, de toute façon j'apprends toujours quelque chose quand je viens te lire, ou ça me pousse à réfléchir. Et ça me plaît . Heu.... ben merci quoi <br />
Répondre
S
<br /> C'est bien la première fois de ma vie que je prendrais la défense de Bourdieu (j'ai rien contre lui mais il a trop piqué chez d'autres mecs, abusé) mais c'est  pas vraiment son rôle de<br /> proposer des solutions. Il était sociologue, pas économiste ni politicien.<br /> <br /> <br /> La seule solution viable pour renverser la tendance, c'est bien entendu de changer le mode de production car l'école étant une institution superstructurale, elle n'est que le reflet de<br /> l'infrastructure. Changer les institutions sans modifier le mode de production est un moindre mal, mais bon, c'est une solution à court terme - comme toutes les mesures sociales-démocrates.<br /> <br /> <br />  <br /> <br /> <br /> Concernant le capital intersubjectif, il ne s'arrête pas seulement à ce genre d'explication. On peut aller plus loin et l'appliquer à d'autres champs.<br /> <br /> <br /> Exemple : je vends une poule sur le marché. D'un point de vue objectif, mon capital est donc une poule qui vaut tant en argent. Mais d'un point de vue intersubjectif ? L'argent, en tant que tel,<br /> est à la lisière entre objectif et intersubjectif. Mais bon, là c'est plus prise de tête.<br />
Répondre

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