Robespierre, ze psychorigid man
in ze psychorigid place
for ze psychorigid people
Ces temps-ci, je rêve souvent à Robespierre. J'éprouve à son égard une admiration qui confine à l'amour. Un amour intellectuel, un amour politique. Je ne ressens pareil dévouement pour aucune autre figure du panthéon communisto-gauchisant.
Bien sûr, il y a l'homme, les idées, l'action politique.
Bien sûr, il y a aussi la mort.
Beaucoup ont écrit là-dessus. Qu'ai-je à rajouter de plus ?
Mais il y a la sexualité. Je suis une personne très intéressée par le sexe. Et Robespierre ne semblait absolument pas l'être. De ce qu'on en sait. Je ne puis dire, comme le prétendent certains, s'il était asexué, s'il se tapait Saint-Just, ou si ça ne l'intéressait tout simplement pas. Je n'en sais rien.
Il est tout de même resté célibataire. Pour moi, il est pur de l'amour et – donc – du mondain. Quelque part, il n'a pas été corrompu.
J'aurais aimé être ainsi fait.
Je rêve donc de Robespierre. Je rêve que je dois prendre sa défense. Je rêve qu'il me parle. Il a toujours une présence bienfaisante, apaisante, amicale.
Cette nuit, j'ai rêvé que des historiens avaient découvert des documents importants sur sa jeunesse à Arras. Des aspects beaucoup moins probes de sa personnalité étaient révélés. J'apprenais qu'il avait été menteur, dissimulateur, défiant, parfois méchant ou mesquin. Mais qu'il avait ensuite beaucoup changé, jusqu'à devenir le politicien que nous connaissons.
J'étais déçu. Mais au final, je constatais que mon admiration ne faiblissait pas.
J'ai compris pourquoi j'ai fait ce rêve.
Depuis quelques semaines, je sais que mon patron "anti lutte de classes" se prépare à vendre son entreprise. Je ne sais pas ce qu'il adviendra de mon emploi, lorsque ça se produira.
Possiblement, je me retrouverai au chômage.
Je suis assez catastrophé à cette idée. J'ai vérifié sur internet : je devrais pouvoir toucher l'allocation chômage pendant deux années entières.
Je n'aime pas cette idée, je suis mal à l'aise avec cela. Mais uniquement pour moi-même. Pour n'importe qui d'autre, aucun problème : le droit au chômage est une maigre protection, un minimum, bien sûr qu'on y a droit et même plus que ça encore !
Mais pour moi-même ? C'est une autre histoire.
L'autre jour j'ai croisé quelqu'un que je n'avais pas revu depuis longtemps. Nous avons parlé de nos situations respectives. J'ai confié que je ne sais pas trop où j'en serai dans six mois. Plus pour me rassurer moi-même qu'autre chose, j'ai ajouté :
- Mais bon, ça va, j'aurai le chômage si tout se passe bien. Mais j'espère que je vais vite retrouver du travail dans tous les cas.
- Je l'espère pour toi aussi ! Moi, je suis au chômage depuis trois mois. Dans un an et demi, je compte partir vivre à l'étranger. Alors, tu vois, je crois que je vais rester sur ma cotisation et en profiter...
Et je me suis dit que je pourrais bien faire la même chose. J'aimerais partir vivre en Allemagne d'ici un an ou deux, justement.
D'un coup, j'ai eu honte de cette idée. Et puis quoi encore ? Ce n'est pas bien !
NON !
CE N'EST PAS BIEN !
C'EST MAL !
TU DOIS TRAVAILLER !
PROFITER DU CHÔMAGE C'EST MAL !
TU AS DES PRINCIPES !
Et merde putain ! J'en ai marre ! J'en ai marre d'être comme ça ! Ce type avec qui je discute, là, il ne se prend pas la tête, lui ! Pourquoi je dois toujous être aussi droit, aussi irréprochable ?
J'ai une sorte de police intérieure
dans ma tête qui me flique tout le temps.
Non, je ne suis pas schizophrène.
Ras le bol, nom d'un tapioca !
Je n'ai pas pris un seul putain de congé maladie depuis que je suis entré dans la vie active (donc depuis dix ans...). PAS UN SEUL. Pourquoi ? CE N'EST PAS BIEN. TU DOIS ALLER TRAVAILLER.
C'est un putain de droit pour les salariés, bordel de merde !
OUI. MAIS PAS POUR TOI.
TU N'ES PAS VRAIMENT MALADE.
LAISSE CELA AUX AUTRES QUI LE SONT POUR DE VRAI.
Franchement, j'écarquille de grands yeux en dévisageant le gars en face moi et je souffle :
- Tu vas taper le chômage jusqu'à ton départ ? Et tu te sens pas coupable ?
- Disons que je ne vais pas vraiment activement chercher du travail... Et attends, j'ai cotisé pour, merde. J'y ai droit.
- Ouah. Je sais pas comment tu fais. Tu sais... je me suis même jamais foutu en caisse de ma vie. Je crois que j'aurais du mal à... à être au chômage sans vraiment chercher "activement" du travail.
- Jamais foutu en caisse ?
- Non, jamais.
- Putain...
- Enfin, à la fois, j'ai toujours travaillé à temps partiel, donc bon, c'est moins dur d'aller bosser mal fichu lorsque ta journée est plus courte.
JUSTEMENT.
C'EST MOINS DUR POUR TOI QUE POUR LES AUTRES.
VA TRAVAILLER.
TA FIEVRE VA TOMBER.
Voilà ce que je me dis quand je suis malade...
Cette conversation, j'y ai pensé avant de m'endormir cette nuit et j'ai fait ce rêve avec le Robespierre que l'on découvrait faillible durant une partie de sa vie – ce qui ne ternissait pas pour autant la grandeur de son action politique.
Ouais, dans ce cas de figure, on peut en effet conclure que les rêves sont plus ou moins des désirs refoulés...
Enfin. C'est joli tout ça. Les petits arrangements de l'inconscient.
Mais toujours est-il que Robespierre, dans la réalité, n'a PAS été faillible. Jamais.
Et même que ça l'a tué.
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