Nombreux sont ceux qui, parmi les lecteurs de mon blog, s’adonnent à l’écriture de nouvelles. Je leur ai déjà consacré un article sur l’édition de cette forme littéraire bien spécifique.
Récemment, une sémillante lectrice m’interpellait sur une autre thématique liée à la nouvelle : le concours.
Je n’ai jamais écrit de nouvelles et connais fort mal tout ce qui s’y rattache. Grâce à cette lectrice, je découvris un univers parfois effrayant, souvent consternant : le monde maléfique du concours de nouvelles pour écrivains non édités (ou « amateurs » comme aiment à le préciser ces dits concours).
Mais pourquoi diable fus-je effrayé, ou consterné, par cette découverte, me demanderas-tu, camarade lecteur ?
Comme d’habitude, je t'explique tout.
Qu’est-ce qu’un concours de nouvelles ?
Un concours de nouvelles est une compétition « littéraire » organisée par un magazine, une radio, un salon du livre, un site web, etc, pour faire parler de lui.
Le principe en est simple.
Un thème est donné. Disons : « la nature ». Puis des exigences : de une à quatre pages, tant de signes, un délai pour rendre sa copie. Les participants sont priés, en général, de ne « jamais avoir été édités ».
Un « jury » lira les nouvelles et les classera sur un podium. Le premier prix se verra refourguer, par exemple, un bouquin, le deuxième prix un stylo, le troisième je-ne-sais-quoi. Et tous les autres garderont le plaisir d’avoir participé – ou la cuisante humiliation de ne pas avoir été choisis…
Moi, personnellement, ce baratin, ça me fait penser aux rédactions à l’école. T'as un sujet, deux heures de composition et puis t'es noté. Y’a le premier de la classe, puis ceux qui viennent après.
Bon. Je reconnais ne pas avoir une estime très romantique de la littérature, ou du moins, je reconnais être très pragmatique à son égard. Mais quand même. De là à considérer la chose comme une rédac à l’école…
Rien que le principe me semble bizarre.
Le concours de nouvelle garde toutefois un intérêt à mes yeux : ça peut donner des idées aux gens qui pratiquent l’écriture en hobby. Voilà, tu as un sujet, et ceux qui aiment bien rédiger de petites histoires seront tout contents de participer. Dans cette perspective, je n’ai rien contre le concours de nouvelles. Hélas, bien souvent, le concours de nouvelles se donne d’autres ambitions.
Ces mecs-là auraient gagné le concours
de nouvelles de livresetmuscles.org
Les concours de nouvelles m’aideront-ils à faire éditer mon premier roman ?
Je te le dis du cash : la réponse est NON. Je me demande qui vous a mis cette idée dans la tête, je le lis souvent, beaucoup de lecteurs m’envoient des messages avec cette question. Désolé de vous décevoir, mais franchement, faut arrêter cinq minutes avec cette légende.
Un concours de nouvelles organisé par un magazine (Télérama, Le Chasseur français), un salon du livre (Rencontres littéraires de Besançon), un site web (fousdelivres.net), quand bien même tu en gagnerais le premier prix, ne t'aidera pas à être édité.
L’exception reste peut-être le milieu de la SF - Fantasy (que je connais mal), qui me semble-t-il compte des revues d’assez bonne qualité qui doivent être lues par les éditeurs de ce genre. De même pour les revues littéraires un peu prestigieuses (LMDA et consorts) : bon, ça te fera toujours plaisir d’avoir été sélectionné dans leur concours. Je doute néanmoins qu’une nouvelle éditée dans une revue aussi prestigieuse soit-elle te facilite réellement l’obtention d’un contrat d’édition pour un manuscrit de roman. Oui, si tu as gagné ce genre de concours, tu pourras le signaler dans la lettre d’accompagnement de ton manuscrit, ça peut toujours inciter l’éditeur à accorder plus d’attention à ton bouquin. Mais ce sera le manuscrit qui déterminera tout, rien d’autre, absolument rien d’autre, et c’est la règle numéro un à apprendre quand on souhaite se faire éditer.
Concernant les concours de nouvelles obscurs, organisés par des sites webs ou de petits salons de province, franchement, aucun intérêt pour un éditeur…
Si tu as gagné un concours de nouvelles dans le cadre des Rencontres littéraires de Bensançon, ou un autre concours lancé par le site web fousdelecture.org, inutile de le mentionner dans tes lettres d’accompagnement. Tout le monde s’en fout comme de l’an quarante.
Après si t'y tiens vraiment, fais-le, c’est comme tu veux.
Les concours de nouvelles organisés dans le cadre d’un salon du livre : Stoni a vu de l’intérieur et te dit toute la vérité
Dans ma magnifique carrière d’écrivain, j’eus l’occasion d’être invité sur plusieurs évènements type salons du livre / festivals littéraires – petits, moyens, gros – qui organisaient, à chaque fois, des concours de nouvelles.
Et j’ai vu comment se déroulait la chose. J’eus alors une pensée émue pour tous les pauvres hères qui avaient participé à cette mascarade en se fendant d’une nouvelle écrite exprès pour l'occasion.
Le jury était composé d’écrivains invités sur ledit salon.
Or, les écrivains sont des feignasses. Si tu ne le savais pas encore, maintenant tu es définitivement au courant. La plupart d’entre eux n’avaient pas lu la moitié des textes envoyés par le public. Le prix était attribué à la ouanagaine à une nouvelle, comme ça, un peu par hasard, celle que tout le monde avait lue en vérité, la première sur la pile…
A ce stade, tu comprendras que le concours de nouvelles, c’est bien pour les gens qui aiment s’entraîner à écrire comme hobby, c’est sympa et gratifiant quand tu le gagnes dans le cadre d’une revue un peu classe, mais ça n’a aucun intérêt dans une démarche d’édition.
Mais il y a encore pire.
Les concours de nouvelles payants : et puis quoi encore ?
NE PAYEZ PAS POUR PARTICIPER A UN CONCOURS DE NOUVELLES ! Après tout ce que j’ai expliqué, tu comprendras que ça n’a strictement aucun intérêt ! Sans déconner, y’a des gens qui passent des centaines d’euros dans ces conneries chaque année !
Après c’est comme tu veux. Si ton hobby c’est les concours de nouvelles, que t'es à fond là-dedans et que tu kiffes trop, vas-y, fais-toi plaisir. Moi j’ai bien dépensé 300 boules pour un vélo, après tout.
Mais ne dépense pas de fric en vue de « participer aux concours de nouvelles pour être repéré par un éditeur » : ça n’arrivera pas. Enfin, tu seras peut-être repéré par un éditeur pourri, mais pas par un éditeur sérieux.
On m’a aussi signalé de petites manœuvres frauduleuses autour des concours de nouvelles. Voici l’extrait d’un mail à ce sujet :
« J'ai participé au prix du jeune écrivain francophone qui s'adresse aux 18-26 ans seulement. Il se vante d'avoir sorti de nombreuses jeunes pousses qui sont depuis devenues des écrivains reconnus par la profession, et proposent dans tous les cas d'envoyer une fiche de lecture personnalisée de ta nouvelle. Le concours est normalement anonyme, mais à peine un mois après avoir participé, je reçois un coup de téléphone. On m'annonce que ma nouvelle a été repérée, car de qualité, qu'ils ne peuvent se prononcer pour l'instant sur les lauréats, mais qu'ils m'invitent à participer à un atelier d'écriture qui aura lieu en compagnie de prix Renaudot, Mallarmé, Goncourt, etc... Mon copain me presse de participer, me disant que cela me fera du "réseau". Mais le prix est trop élevé pour ma bourse d'étudiante 150 à 200 euros je crois. Qui plus est, je sens une tentative de me soutirer de l'argent, je refuse donc (poliment). Plus de nouvelles d'eux, et là, je viens de voir que lors du classement définitif, je ne fais même pas partie des demi-finalistes ! »
Etrange pour une nouvelle « repérée, de qualité »…
A l’image de cette charmante jeune lectrice, méfie-toi constamment de ce genre de démarches abusives.
Pour se faire éditer, la seule chose qui doit te coûter de l’argent, ce sont les photocopies et les envois du manuscrit ! Je le dis une bonne fois pour toutes !
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