Non, je vous assure,
avoir le feu au cul
ça n'arrangera rien
Comme tu le sais ami lecteur, nombre d’auteurs en quête de première publication échouent d’une manière ou d’une autre sur ce blog. Certains m’envoient un message pour me raconter leur expérience ou pour glaner quelque conseil (au passage : JE NE LIS PAS VOS MANUSCRITS, car, comment dire, j’ai une vie à côté du blog et je n’ai pas que ça à foutre).
Un élément revient souvent dans ces messages : la hâte.
Salut Stoni,
J’ai 22 ans et je veux être édité d’ici un an car après je pars en Erasmus en Chine.
....
Bonjour,
J’ai envoyé mon manuscrit à dix éditeurs, que des refus, que faire je suis désespéré ! Je veux être édité le plus vite possible !
Etc, etc, etc…
Voilà.
Je vais vous dire une bonne chose, les gens.
Ceux qui partent avec l’urgence au cul partent au mal. L’édition est l’univers de la lenteur. Rien n’est plus lent, plus sinueux, qu’un parcours éditorial.
Un auteur ne doit pas être pressé, qu’il soit déjà édité ou encore en quête d’un premier éditeur. Notre travail est tout sauf rapide.
Pour t'illustrer cela, voici le parcours temporel d’un auteur type. Tu vas mieux comprendre.
Ecriture d’un roman : de trois semaines à deux ans.
Travail sur le roman : de trois semaines à deux ans.
Envoi des manuscrits, recherche d’éditeurs : de six mois à quinze ans.
Vous allez penser que je radote, mais je m’en fous. Vu les messages que je reçois, je n’ai pas encore assez radoté. Je rappelle qu’Antoine Volodine a mis quinze ans à trouver un éditeur. Ok ? Le prochain qui m’écrit « bouh bouh ça fait six mois que je prospecte et toujours rien ! », je l’envoie se faire volodiniser dans les putains de règles de l’art. Merde à la fin !
Lire à ce sujet l'article : comment savoir si mon roman est publiable ?
Moi, j’ai mis environ deux ans à décrocher mon premier contrat. J’ai eu du pot. Vraiment.
Reprenons notre parcours temporel.
Négociations avec le premier éditeur : une à quatre semaines.
Signature du contrat.
Préparation éditoriale (réécriture du manuscrit selon les exigences de l’éditeur, rencontres pour discuter du manuscrit, travail sur le texte avec l’éditeur, rencontre avec les représentants, contrôle de la couv, de la 4èmede couv, relecture du BAT) : au moins un an.
Ça peut être moins de un an, mais c’est rare. En général le délai compris entre la signature du contrat et la sortie du bouquin va plutôt de un à trois ans.
Parution du bouquin.
Durée de vie du bouquin en librairie : une à trois semaines.
Et voilà. Tout ça pour ça.
Tout ça pour trois semaines de présence en librairie.
Bien sûr, le roman peut rester davantage s’il se vend bien. Mais pour la plupart des primo-romanciers, trois semaines, ça sera déjà pas mal…
Franchement, tu trouves que ça vaut le coup de vouloir être pressé ?
Fais le compte.
Tu t'engages dans un processus qui va durer au mieux deux / trois ans, au pire vingt ans.
Tu veux être édité et tu es du genre « j’ai le feu au cul » ? Soit tu te calmes et tu changes de conception temporelle pour cette nouvelle aventure. Soit tu mets une croix sur ton projet.
Le pire, c’est de recevoir des messages d’auteurs qui ont vingt-cinq, vingt-deux, dix-huit ans, seize ans et qui me sortent des trucs du genre « JE DOIS ETRE EDITE A TOUT PRIX ET VITE ». Putain mais t'as vingt-deux ans mon pote ! Hello ? VINGT-DEUX ANS ! T'as toute la vie devant toi, bordel de merde !
Si tu persistes à vouloir être édité « dans six mois parce qu’après je pars vivre chez ma fiancée en Suède », tu vas nous développer un ulcère dans les deux mois à venir. Puisque, combien de fois devrai-je vous l’écrire ? TU NE SERAS PAS EDITE AU BOUT DE SIX MOIS DE PROSPECTION (du moins pas chez un bon éditeur, si tu veux être édité au bout de six mois tu peux essayer avec les éditeurs pourris, c’est comme tu veux).
Bien sûr, les exceptions, ça arrive.
C’est comme de gagner au loto, quoi. Ça arrive. A une personne sur trente millions, genre. Mais ouais, en effet, ça arrive.